Trésor Musical Pour Certains, Coffre Vide Pour D'Autres, Nous Avons Écouté "Or Noir Part. 3" De Kaaris

Analyse du dernier album du Dozo.

Musique 

Pour ceux qui ne connaissent Kaaris que depuis quelques mois, Or Noir Part. 3 n’est sûrement que l’album du rappeur qui s’est bagarré à Orly. C’est l’album du rappeur qui veut organiser le combat du siècle dans “l’octogone” face à Booba et qui échange des insultes sur le plateau de TPMP avec ce dernier. Pour d’autres, c’est la 3ème édition du projet qui a hissé l’artiste dans les hautes sphères du rap français. Sorti en 2013, Or Noir Part. 1 soufflait comme un vent de fraîcheur sur une industrie à demi endormie avec sa trap directe et efficace. Avec trois albums alternant le bon et le moins bon, Riska a tout de même su décrocher des disques d’or et de platine à coups de “double-fuck” tout en s’adaptant aux changements des tendances musicales pour sortir des hits comme “Blow”, “Nador”, “Tchoin” ou “Diarabi”. Mais qu’attend-on réellement d’Or Noir Part. 3 ?

Photo De Kaaris

Avec la surexposition médiatique de Kaaris durant ces derniers mois, on en aurait presque oublié que son or sombre n’est pas destiné à tous. Que sa trap violente est un rap de niche. Que ses thèmes de prédilection sont ceux de son genre. Le Parisien dressait une critique d’Or Noir en le mettant directement en opposition avec B2O : “Difficile de prendre Kaaris pour un véritable concurrent à Booba avec son nouvel album”. Quel dommage de ne résumer Kaaris qu’à une sorte de battle musicale avec son ennemi juré. Comme si l’un et l’autre n’étaient destinés qu’a être comparés. Fidèle au poste, le K Double A n’étonne pas (plus) les aficionados du rap en faisant l’apologie du crime, en martelant des propos sexistes et en empilant les références de calibres et de cylindrées. Mais qui peut citer un rappeur aussi brut, cru et direct, avec le même statut dans le paysage musical français ? Six ans après son premier album, quelle histoire Kaaris peut-il nous conter ?

Avant même de se pencher sur ce que ON3 nous raconte, il faut tendre l’oreille pour analyser les bandes sonores sur lesquelles se pose la voix rauque de Kaaris. Car cet opus est avant tout un véritable trésor d’instrumentales. Le gotha des beatmakers de l’Hexagone s’est réuni pour offrir ce bijou au Dozo. Ce n’est qu’après cette écoute attentive que le phrasé violent du rappeur de 38 ans pourra être déchiffré afin d’émettre une critique constructive d’Or Noir Part. 3. Un opus parfois simple et accessible, parfois agressif et malaisant, mais qui ne laisse personne indifférent.

Or Noir Part. 3, un trésor d’instrumentales

Pour commencer ce nouvel opus, Kaaris a choisi le morceau “Chien de la casse”, produit par MōC que l’on retrouvera sur deux autres morceaux et qui n’est autre qu’un collectif composé d’anciens de chez… Therapy Music. Si la trap sombre de 2013 s’est un peu éclaircie au gré des modes et des tendances, le K Double A a enrichi sa recette, sans en changer les ingrédients. Et ça se ressent. Les premières notes de cet album donnent le ton et le “2.7.0” interrompant 10 premières secondes d’ivresse électronique laisse présager l’or obscur de cet album. À ce trio de beatmakers on peut ajouter Double X. Si vous ne connaissez pas ce duo originaire de Livry-Gargan, vous connaîtrez peut-être les bangers qu’ils ont produit pour Damso, Niska, SCH ou Lacrim. Ils sont notamment derrière le percutant “Monsieur Météo” ou l’entêtant “Ça on l’a”. Le 3ème à se distinguer avec 3 productions sur ON3 n’est autre que Drama State. Sur “Briganté”, “Golf 7 R” ou “Comme un refrain”, la voix rauque de Kaaris s’adoucit d’un autotune qu’il maîtrise depuis maintenant plusieurs années et qui symbolise sa polyvalence artistique. Avec ce trio de beatmakers à la baguette de plus de 70% de son album, Kaaris s’est fabriqué un trésor d’instrumentales. Mais la plume du natif d’Abidjan s’est-elle montrée à la hauteur ? Avec une fanbase assez éclectique, parfois versatile ou prise à contre-pied par un Dozo multifacette, on peut se demander si le Kaaris que tout le monde attend n’est pas une chimère populaire.

La violence des mots, la force du propos

Fin 2012, la France entière reprenait le désormais classique “Mes deux questions préférées : qu’est-ce j’vais faire de tous ces deniers ? Si j’te fends le crâne en deux, quel œil va s’fermer le premier ?”, dans ce classique du rap français qui a vu le rappeur de Sevran émerger avant de briller avec Or Noir. Si son premier album est bel et bien un succès commercial, le statut de fulgurance du couplet de “Kalash” ne peut être validé que par l’irrégularité de son premier opus. Capable du meilleur, comme du pire. Et c’est toujours ce qu’on peut reprocher à la 3ème partie d’Or Noir. Un album où Kaaris peut cracher un brasier vif :“Coussin sur ta joue pour étouffer le bruit du tokarev russe, ou j’mets un coussin sous tes genoux, faut bien qu’tu sois à l’aise quand tu m’suces” avant de s’enfumer dans une facilité quelconque : “Ça sent la fume au fond de ma grotte, t’as des poils de couilles au fond de ta gorge, je suis le Prince et je suis le Roi et toi tu bois, dans mon rince doigts.”

“Pute ne trouve pas le sommeil, pourtant l’anus porte conseil”

Sur des prods de haute voltige, Kaaris distille sa trap et ses refrains répétitifs d’une subtilité vulgaire comme dans “Monsieur Météo” : “Pute ne trouve pas le sommeil, pourtant l’anus porte conseil” ou sans réelle plus-value artistique comme dans “Chien de la casse” : “Chien de la casse, chien de la casse, j’ouvre le sas, full aux as, j’ouvre le sas, full aux as, kalash, famas, kalash, famas”. Agrémentés de gimmicks bien inscrits dans la marque de fabrique de Riska depuis son “Oh Click !” emblématique, les morceaux sont tous saupoudrés de “sku, sku”, “Kaaris”, “pute” ou de “pah, pah”. Rien de bien étonnant ici, et si on peut souligner l’irrégularité dans les lyrics de ce projet, il est impossible de nier l’intelligence artistique de Kaaris, qui s’adapte aux tendances et aux impératifs de l’industrie musicale d’aujourd’hui. Mais derrière cette intelligence, il y a aussi un choix fort.

Le choix de ne mentionner aucun de ses détracteurs. De ne même pas mentionner Booba comme il aurait pu être tenté de le faire pour multiplier les clics et faire gonfler le buzz. C’est seulement dans “Aieaieouille” que Kaaris assène un “Trop de haineux, si je meurs, enterrez-moi au Mont Valérien” (NDLR : Booba déclarait ne pas vouloir être enterré au Mont Valérien à Nanterre dans le morceau “Habibi”) suivi d’un “Personne va m’coucher à Orly, j’suis une légende urbaine”, soit deux punchlines timides qui ont le don de décevoir les médias et les fans friands de clash. Cette plume qui tombe parfois dans la facilité d’écriture a donc fait le choix de ne pas utiliser une arme pourtant à portée de main, et c’est tout à son honneur.

Alors qu’Or Noir Part. 3 n’est disponible à l’écoute que depuis quelques heures, les critiques pleuvent et les internets ne sont pas très cléments avec le Dozo. Sans tomber dans le jeu de la comparaison avec Booba que de nombreux médias s’offrent, il faudra laisser le temps à cet album de mûrir comme il le mérite. Ce dernier a au moins le mérite de bien sonner. Avec des morceaux à la hauteur de l’événement comme “Cigarette” avec SCH, “Monsieur Météo” ou “Aieaieouille” déjà validés par les internautes, ON3 est déjà bien armé pour surnager dans l’océan que devient le rap français. Mais le débat reste ouvert. Comment va évoluer cet album ? Quelle va être sa durée de vie ? Kaaris n’a sûrement jamais eu une telle exposition médiatique dans sa carrière et son dernier bijou va sûrement se retrouver entre les mains de toute la France. À l’heure où le streaming est roi, il ne faudrait pas que son Or Noir Part. 3 sombre aux oubliettes comme un trésor de pirate.


                                    
                                    

                                    
                                    

                                    
                                    

                                    
                                    

                                    
                                    

                                    Photo De Kaaris
                                
 Crédit photo : Mister Fifou
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