Photo Diam Concept
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Studio Visite – Plongée chez Diam Concept, la société qui fait pousser (oui, pousser) des diamants en Île-de-France
Rencontre avec le premier producteur français de diamants de culture.

Mais, on peut faire pousser des diamants ? La réaction est unanime à la lecture de l’activité d’Alix Gicquel, fondatrice de la start-up Diam Concept. Cette professeure des Universités multiplie depuis quelques semaines les apparitions médiatiques, signe d’une curiosité générale, pour révéler le procédé appliqué par son équipe dans les locaux du CNRS de l’Université Paris 13, du côté de Villetaneuse dans le 93. Sourire enjoué, elle a pris pour habitude de rajouter à la stupéfaction en parlant micro-ondes, gâteau, croissance de pierre précieuse “entre 4 et 6 semaines” seulement, pour une production d’une qualité en tout points équivalente aux diamants naturels pour un prix final 30 à 40% moins cher que les gemmes extraits des mines. Une révolution dans un marché pour le moins opaque. Ok. Mais on y revient : peut-on vraiment faire pousser des diamants ?

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Feu de cheminée, carbone et micro-ondes

Parfaitement apprêtée dans un chemisier de créateur orange à l’heure de nous recevoir dans ses locaux, Alix Gicquel, quelques cailloux posés délicatement face à elle, vulgarise. “Le diamant, ce n’est que du carbone. Quand vous faites un feu de cheminée, vous voyez du noir de carbone sur les parois. Eh bien, la probabilité de formation de diamant n’est pas absolument nulle. Donc si on se met dans un environnement où on crée les conditions pour empêcher ce noir de carbone de se former, le diamant pousse. C’est comme ça que ça marche“, explique-t-elle. Elle nous désigne de petites plaques, “des plaquettes de diamant, des germes qu’on achète ou qu’on fabrique sous haute pression de température et qu’on polie“, et conduit dans une petite pièce encombrée de machines vrombissantes. Là, les petites plaques sont placées dans une enceinte. “Elle fait partie d’une cavité micro-ondes, on ajoute un gaz avec du carbone pour pouvoir faire du diamant, et un autre gaz pour empêcher qu’il se forme autre chose que du diamant“. Simple. Au fond de l’enceinte, quelques pierres rougeoyantes en pleine croissance. Il ne leur faudra que 4 à 6 semaines – “tout dépend de la taille du germe” – pour arriver à maturation. Après quoi, on récupèrera au laser le mono-cristallin du diamant de culture, “exactement le même” que le naturel, pour qu’il soit taillé et enfin distribué aux joailliers.

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Aussi surprenant le procédé soit-il, il n’est pas nouveau, dans la mesure où il se dit que le premier diamant de culture fut produit en 1954. Il n’était cependant pas destiné à la joaillerie, à l’image d’Alix Gicquel, qui travaille pourtant sur l’élaboration de ces gemmes depuis plus de 30 ans, après un déclic lors d’une conférence au Japon en 1987. “Je viens des mondes des plasmas, donc c’était de la recherche d’une part sur le plasma lui-même, et d’autre part du diamant pour les applications de haute technologie“, le diamant ayant des propriétés permettant d’optimiser des outils technologiques. Ce qui l’a faite basculer dans la joaillerie avec la création de Diam Concept en 2016, en plus de son intérêt pour les bijoux, n’est rien d’autre qu’un film qui a engendré une prise de conscience générale.

“Le diamant du futur”, propulsé par Leonardo DiCaprio

C’est Blood Diamond et son premier rôle Leonardo DiCaprio, qui ont changé la vision du monde sur la pierre précieuse en 2007. Suivant un trafiquant prêt à tout pour mettre la main sur un diamant rose extrêmement rare, le long métrage montre la souffrance, les conflits et l’opacité entourant l’extraction du gemme. “Ce film a ouvert l’esprit des gens sur le côté non éthique et non éco-responsable des diamants“, relate Alix, qui assure que DiCaprio, dont l’investissement écologique n’est plus à prouver, s’est personnellement impliqué pour développer la culture du diamant. “Dans la foulée, il a rencontré des chercheurs qui avaient beaucoup travaillé sur le sujet, et ils ont monté ensemble un groupe aux États-Unis, qui a lancé cet engouement. Il y a eu différentes sociétés de production de diamants avant ça, comme Apollo, mais sur la joaillerie, ce qui a vraiment pris, c’est cette société californienne où DiCaprio a investi, parce que tout le monde le connaît“, poursuit-elle.

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Le diamant de culture, “écologique et éthique“, se place donc à l’opposé du diamant naturel. D’autant qu’il permet aussi de se passer de la foule d’intermédiaires de son cousin – d’où son prix plus accessible – pour une traçabilité assurée et un contact direct avec les distributeurs et joailliers. Le concept séduit : si Diam Concept n’a pour l’instant livré ses pierres qu’à Courbet, joaillier établi sur la Place Vendôme, les contacts clients se multiplient, la demande est prête à exploser. Et Alix Gicquel de parler développement, avec la concrétisation prochaine d’une levée de fond qui permettra à la start-up de recruter, déménager dans de nouveaux locaux et lancer de plus grands réacteurs pour augmenter la production. Seule société française à produire du diamant, dans un marché encore limité aux US, et dans une moindre mesure à la Chine et à la Russie, Diam Concept pourrait tirer son épingle d’un jeu à venir, celui d’une mode plus écologique dont il symboliserait parfaitement la démarche. On imagine donc bien les grandes Maisons suivre le filon. Si Alix Gicquel n’y pense pas encore sur du court terme, elle est convaincue que tout peut arriver. Et glisse, dans un dernier sourire : “C’est le diamant du futur“.


Credits
Photographer
Pete Casta/Hypebeast France
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