Wesley Sneijder, Le Double Oublié Du Ballon D'Or

France Football, l’hebdomadaire pourvoyeur du prestigieux Ballon d’Or, a regretté cette semaine n’avoir pu donner son Graal à Andrés Iniesta. Sous prétexte que le génial milieu de terrain du Barça quittera cet été le “football qui compte” pour la Chine, et ne pourra donc plus y prétendre, la publication s’est fendue d’un mea culpa, pointant le fait que ce talent unique aurait mérité la plus haute des distinctions personnelles. Or, et c’est l’un de ses principes fondateurs, le Ballon d’Or récompense le meilleur joueur d’une saison, pas une carrière. Et au moment de rappeler qu’Iniesta n’en était pas passé loin en 2010, FF ravive une autre injustice émaillant son palmarès, bien plus grande car basée sur ces mêmes règles.

L’heureux élu doit, sur une saison, avoir brillé autant individuellement que collectivement, tant en club qu’en sélection nationale, avec deux compétitions majeures qui guident les choix finaux : la Ligue des Champions et la Coupe du monde. 2010 n’était pas l’année d’Iniesta, deuxième au classement. Encore moins celle de Lionel Messi, le lauréat. 2010 était l’année de Wesley Sneijder. Le milieu offensif, qui soufflera bientôt ses 34 bougies, avait marché sur l’eau cette saison-là. Il était le chef d’orchestre de l’équipe qui a dominé l’Europe, l’Inter Milan, laquelle avait notamment éliminé le Barça des deux premiers nommés en demi-finale de la compétition. Une Inter aussi brillante chez elle que sur les pelouses continentales, avec ses titres en championnat et Coupe d’Italie. C’était l’Inter du triplé, et le principal artisan du succès, Wesley.

Un homme qui a bien failli récidiver le même été sous le maillot “oranje” des Pays-Bas. Meilleur buteur de la compétition, Sneijder a emmené les siens jusqu’en finale, où ils tombèrent face à l’Espagne d’Iniesta. En faisant les comptes il n’y avait pas photo, l’Interiste était devant. Alors pourquoi n’a-t-il pas gagné ? C’est assez simple : le Ballon d’Or fusionnait cette année-là avec la distinction de joueur de l’année de la FIFA, et introduisait les capitaines et sélectionneurs des équipes nationales dans les votes aux côtés des journalistes, auparavant seuls décisionnaires. Ce qui a fait pencher la balance en faveur d’un Messi, auteur d’une saison statistiquement extraordinaire avec 48 buts en 64 matches toutes compétitions confondues, mais seulement quart de finaliste du Mondial. Sans le vote des personnalités du football, Sneijder, 4e du classement final, aurait remporté la palme.

Si on doit éprouver un regret, il ne devrait donc concerner que Wesley. Il est sûr que Sneijder n’a pas la gentille personnalité d’un Iniesta, auquel il oppose une certaine arrogance, caractéristique de cette équipe des Pays-Bas version 2010, dont on aime peu se rappeler. Pourtant, il le faudrait plus que jamais : alors qu’Iniesta a fait une carrière aussi fantastique que linéaire, Sneijder, lui, a commencé son déclin peu après sa folle campagne 2010. Jusqu’à… quitter Nice et le football européen cet hiver, pour atterrir au Qatar. Personne ne s’en est ému. Personne n’avait tenu à lui formuler alors de plates excuses. Après tout, cela faisait déjà bien longtemps qu’il ne pouvait plus y prétendre, à ce BO. Mais c’est bien lui, pourtant, qui méritait le plus de décrocher les honneurs dans l’histoire récente.

Alors comme on dit là-haut, aux Pays-Bas : Sorry, Wesley.