Rencontre avec le kid ambitieux du rap UK, Aitch

D’inconnu à superstar britannique, le gamin de Manchester s’attaque à l’Europe toute entière.

Musique 

Au Royaume-Uni, difficile de passer à côté du rappeur Harrison Armstrong, plus connu sous son nom de scène Aitch. À 20 ans à peine, le Mancunien a fait une entrée fracassante sur la scène UK, à force d’un talent hors pair, d’un flow sans pareil et d’un Manchester spirit à toute épreuve. Son tout premier succès, à seulement 18 ans, Straight Rhymez, cumule les millions de vues sur YouTube et lui permet d’être repéré par un certain Stormzy mais également Ed Sheeran. Celui qui impressionnait déjà ses camarades d’école avec des freestyles léchés est désormais dans la cour des grands. Deux EPs – On Your Marks et AitcH20 – acclamés par la critique plus tard, Aitch est prêt à franchir un nouveau cap dans sa jeune carrière avec une toute première tournée hors de ses terres. Après avoir conquis l’exigeant public londonien notamment, le voilà désormais à l’attaque de l’Europe toute entière.

Et c’est à Paris, à l’occasion de sa toute première date loin de l’Angleterre et ses tribulations, qu’HYPEBEAST FRANCE a rencontré le jeune prodige du rap. Un garçon à la bonhommie communicative accompagné d’une bande de potes ravis de découvrir la capitale française, tous prêts à enflammer le public de la salle de la Boule Noire du quartier Montmartre, une salle modeste mitoyenne de La Cigale qui affichait complet pour l’occasion. Une fierté pour celui qui a grandi dans le quartier de Moston à Manchester qui se demandait encore, quelques heures avant le show, comment le public français allait l’accueillir.

D’un naturel spontané et avenant, le kid de Manchester a évoqué pour nous ses débuts tonitruants dans l’industrie musicale, sa ville natale, ses ambitions ou encore la difficulté que connaissent les artistes anglais à s’imposer durablement aux États-Unis. Entretien fleuve avec la nouvelle coqueluche du public britannique aux objectifs débordants.

Photos Aitch

Crédits : James Barber

HYPEBEAST FRANCE : Harrison, comment ça va ? Tu viens d’arriver à Paris, tu connaissais déjà un peu la ville ?

AITCH : C’est ma deuxième fois à Paris. La première fois, c’était pour tourner la vidéo ‘French Kisses’ avec ZieZie. Mais j’y étais seulement pour un seul jour. Une fois encore je suis là seulement pour un jour, mais j’adore. Après le show, on part pour Amsterdam demain.

Tu en penses quoi ? Paris t’inspire quelque chose de particulier ?

J’adore. Il y a un genre d’énergie ici que je n’avais jamais expérimenté encore. Je n’arrive pas encore à mettre le doigt dessus, je ne sais pas comment appeler ça pour l’instant. Mais c’est sûr que je vais commencer à venir ici plus souvent. Ça me rappelle un peu Londres dans un certain sens. Et c’est peut-être un truc à la con comme réponse, mais ça me rappelle aussi New York. Je sais pas pourquoi, mais c’est l’effet que ça me fait. Mais, ouais, j’adore, carrément. On ne peut pas se tromper avec Paris. On ne peut pas se tromper. Quand je vais quelque part, je compare toujours l’endroit où je suis avec des lieux que je connais, mais avec Paris je n’y arrive pas. C’est incomparable, à l’exception de quelques rues, comme je te disais. C’est juste Paris.

Si on ne se trompe pas, c’est d’ailleurs la première fois que tu donnes un concert en dehors de tes terres britanniques ?

Exact, c’est la première fois que je fais une tournée hors du Royaume-Uni. Et c’est même ma toute première date de mon tout premier tour hors du Royaume-Uni aujourd’hui ! Donc j’espère que ça va donner le ton pour le reste. Je suis hyper excité. Je ne sais pas comment la foule va être. Est-ce qu’elle va chanter les paroles de tous mes sons ? Ou seulement de mes hits ? Ou est-ce qu’elle va simplement turn up ? Je sais juste que ça va être malade !

Tu peux nous retracer ton parcours jusqu’ici ? Comment était ton enfance à Manchester ?

Mon enfance ? Disons qu’elle aura été plutôt tranquille, plutôt calme. J’ai grandi dans un endroit appelé Moston à Manchester qui est un peu genre moitié bien/moitié pas bien selon le côté où tu te trouves. Je suis allé à l’école là-bas, j’ai tout fait à Moston. J’étais plutôt bon, d’ailleurs, à l’école, je ne m’attirais pas trop d’ennuis. Après ça, je suis allé au collège pour commencer à faire du sport. Mais à ce moment-là, j’étais la seule personne de la classe à fumer, tous les autres étaient focus, voulaient simplement faire du foot. Je ne sais pas pourquoi j’ai choisi ça (rires). Du coup j’ai arrêté – au fait je ne fume plus aujourd’hui – et j’ai commencé à travailler avec mon grand-père. J’étais pas déclaré, on me payait au black. Je n’ai pas trop aimé non plus. Et quand j’ai décidé d’arrêter… ah et depuis mon temps au collège, je rappais beaucoup, tout le temps, partout. Donc, je te disais, quand j’ai arrêté de travailler, le timing était juste parfait car c’est à ce moment là que j’ai explosé aux yeux du public. J’ai quitté mon taf’ et la chanson que j’ai release après, c’est devenu un délire. C’était comme si Dieu me disait de quitter mon boulot. Et depuis, tout ne fait que monter, monter, monter. Rien ne ralentit depuis ce jour et je touche du bois pour que cela continue ! Mais oui, mon parcours a été tranquille si l’on peut dire ça comme. Un smooth ride.

Est-ce que tu dirais que c’est Manchester qui a façonné ta façon de penser, de voir les choses et, surtout, de faire de la musique ?

À 100 000 000% oui. Oui, oui et encore oui. Si j’avais été de Londres, ou de n’importe quelle autre ville, je ne serais pas là devant toi. C’est sûr. Je pense que j’ai un certain… un certain regard sur les choses, sur la vie, que d’autres n’ont pas, car je suis de Manchester. La manière dont je parle, dont je pense… Même chez les gens étrangers au Royaume-Uni, tous peuvent dire que je suis d’Angleterre, mais ils savent que je ne viens pas de Londres. Donc oui, c’était même un avantage pour moi je dirais, même si parfois, ça m’a desservi car c’est bel et bien à Londres que les choses se passent, et qu’il y a l’argent, aussi. J’ai toujours dû passer par là quand même pour récupérer certains trucs. Mais quand j’y allais, j’apportais ma vibe de Manchester, tu vois ce que je veux dire ?

Qu’est-ce qui différencie selon toi le rap de Manchester et celui du reste du Royaume-Uni ?

Je ne veux pas paraître arrogant ou quoi, mais je vois Manchester comme l’exemple parfait, l’endroit qui représente le mieux le Royaume-Uni. Tu vois, à Londres, le truc qui cartonne en ce moment c’est le drill. Tout le monde n’écoute que ça. Mais à Manchester, on fait ce qu’on veut, on écoute ce qu’on veut. Que ce soit des trucs qui font 10 millions de vues ou bien 10 vues, tu vois ce que je veux dire ? Et c’est ça que j’aime. On est dans la vibe. Différentes villes représentent différents trucs, dans le fond. Mais à Manchester, on ne vit que pour notre vibe.

Tu es la nouvelle star du rap UK à seulement 20 ans et ton explosion auprès du public a été très rapide. Ce nouveau monde qui s’ouvre à toi n’est-il pas trop intimidant ?

Intimidant, pas vraiment. Je ne trouve rien d’intimidant à tout ça, je ne ressens pas vraiment la pression. Pour moi, tout ce qui m’arrive est mérité et je ne serais pas pleinement satisfait si je n’étais pas là où je suis. Je crois vraiment que je suis à la place où je dois être et je dois simplement continuer à avancer, rester fidèle à ce que je suis.

Au moment de ton éclosion, tu as rapidement été repéré par Stormzy. Qu’est-ce que tu as ressenti à ce moment-là ?

Quand j’ai explosé, tous les yeux étaient tournés vers moi. Tout le monde se demandait ce que j’allais faire ensuite. Et pour être honnête, je n’ai rencontré Stormzy que deux fois. Il a toujours été un supporter, toujours eu des choses gentilles à dire sur moi. Et vice versa. J’ai fait ce que je pouvais pour l’aider de mon côté, quand bien même il n’a aucunement besoin de mon aide. C’est vraiment un bon gars.

Qui sont tes inspirations dans la musique ?

Mon inspiration ? Comme je te disais, Manchester est ma principale source d’inspiration. Mais dans la musique, si je n’ai pas de noms précis à te donner, je peux quand même dire que tous ceux qui ont du succès m’inspirent. Le succès même m’inspire. Les gens qui accomplissent leurs objectifs, ceux qui envoient du lourd, c’est ça qui me donne envie de me lancer et faire la même chose. Je suis plus en mode “oh, mon gars est top 10, cheers, il faut que je fasse la même”, “mon gars a sold out ce stade, moi aussi j’en veux!”. Les accomplissements, voilà ce qui m’anime.

Quel est le message, s’il y en a un en particulier, que tu veux véhiculer avec ta musique ? On ressent quand même une énergie frénétique mais toujours positive.

Ouais, carrément. Toujours. Tout est une question d’énergie, de transmission de vibe positive. Quant à mon message… mon message principal… (il réfléchit) ce serait de ne pas se prendre trop au sérieux. Du fait de ma position, je dois être sérieux et travailler dur mais au final je ne reste qu’un petit gamin. En fait, mon message, c’est que les choses ne sont pas toujours aussi profondes, tu vois ce que je veux dire ? “It’s not always that deep”. Il y a des fois où il s’agit juste de s’amuser et kiffer le moment, la vibe. Quand je suis au studio, je ne cherche pas forcément le verse le plus chaud du monde. Personne ne va me kiffer plus, plus danser sur ma musique, si je crache un million de mots en une punchline. Certains veulent simplement bouger leur tête et ressentir un truc. Mon but à moi, c’est de donner de la vibe. Je ne me connais pas encore parfaitement non plus, tu sais. Mais ne crois pas que je ne suis pas sérieux du tout. Bien sûr, il y aura aussi des morceaux pour ceux qui veulent se poser et écouter quelque chose de plus sérieux. J’ai quand même des messages à faire passer et celui-ci sera clair, peu importe de quoi il s’agit.

À quoi ressemblent tes sessions d’enregistrements au studio ? Es-tu un monstre du travail ?

Ça dépend, vraiment. Il y a des fois où j’arrive au studio et j’enregistre une chanson en quelques heures. Il y a d’autre fois où ça me prend plusieurs heures à écrire juste un couplet. Mais je remarque quand même que plus la session studio s’allonge, plus mes sons seront meilleurs. Je sais pas comment dire ça sans paraître mauvais mais, personne ne sera meilleur s’il enregistre un son à toute vitesse. Un mec peut arriver dans le studio et enregistrer 20 morceaux en 2 heures, juste comme ça. Moi, je peux rester au studio pendant 12 heures et ne sortir qu’un titre. Mais j’estime que ce morceau là est meilleur que les titres que j’aurais pu sortir en vitesse, tu vois ce que je veux dire ? Quand j’ai du mal avec une punch, je prends le temps de me poser, d’y revenir. Le temps est la clef. L’important est d’être patient avec soi-même, ne pas se stresser si on n’y arrive pas car on sait qu’on peut y arriver.

On se demandait pourquoi les rappeurs UK avaient du mal à s’imposer sur la scène américaine. Vous parlez la même langue et, pourtant, on a l’impression que vous n’êtes pas reconnus à votre juste valeur là-bas. Tu as une explication ?

Hmm. Je pense que c’est principalement dû au fait que tous ceux qui débarquent aux États-Unis pour représenter les UK arrivent là bas en essayant de faire exactement comme les rappeurs US. Quand tu les écoutes, tu peux les prendre pour des ricains. Et les Américains ne veulent pas écouter des versions UK de leurs propres rappeurs. C’est comme si je venais en France et que je commençais à rapper en français, tout le monde s’en foutra parce que vous avez déjà plein de rappeurs français, tu vois ? Ça va prendre du temps mais les Américains veulent quelque chose de frais, un truc nouveau dans leurs oreilles. C’est ça qui va retourner les États-Unis. C’est ce que je pense, je peux me tromper.

Photos Aitch

Crédits : Joseph Okpako/Getty Images

D’ailleurs, c’est une ambition pour toi de te faire un nom aux États-Unis ?

Ouais clairement, et je sais que ça va arriver. Mais je ne me concentre pas sur les US, je ne me mets pas cette pression. D’abord, je m’attaque à l’Europe. Je préfère prendre l’Europe entière dans un premier temps plutôt que de me fondre dans un moule qui ne me correspond pas entre l’Angleterre et Los Angeles. Je préfère largement remplir des stades, des festivals par ici plutôt que ne serait-ce qu’effleurer la scène américaine pour le moment. Pour certains c’est différent, donc j’imagine que ça dépend.

Quels sont tes projets pour 2020 ? On peut s’attendre à un premier album studio de ta part ?

Vous pouvez l’attendre, mais, est-ce que vous aller l’avoir ? Je ne sais pas ! Non mate, je ne vais pas te mentir, je ne vais pas sortir d’album cette année. Nah… Tout le monde l’attend, mais je préfère être ce mec bizarre et ne pas en faire un. Et je ne pense pas en avoir besoin en fait. J’ai sorti un EP l’année dernière, je suis en tournée dans toute l’Europe. Après je vais en Australie, Nouvelle-Zélande… Et tout ça grâce à l’EP. Peut-être que d’ici la fin d’année j’aurais des chansons que j’imaginerais bien figurer sur mon album, mais non, il n’y aura pas sortie. Et tu es la première personne à qui je dis ça !

Jusqu’où veux-tu emmener ta musique dans un avenir proche ?

C’est simplement d’être… Bon bien sûr je veux être le meilleur. Mais je dirais que je veux simplement être respecté pour ma musique. Je veux que les gens trouvent ma musique géniale, c’est peut-être con comme réponse, mais c’est vraiment ça. Je veux être reconnu comme un artiste. Même si tu trouves que je suis une merde, je veux que tu me reconnaisses. Et bien sûr, je veux un peu de thunes, quand même.

Et ton futur personnel ?

Mon futur ? J’ai l’impression que tout peut arriver, déjà que je ne me voyais pas aussi loin l’année dernière… Donc j’en ai aucune idée à vrai dire. Peut-être posé à Paris, dans un penthouse en train d’écrire mon album, mon quatrième genre (rires). Non, juste plus de musique, plus de meilleures musiques, plus de tournées. Continuer à construire jusqu’à ce qu’on ne puisse plus le faire.

On peut te souhaiter quelque chose avant de te laisser ?

(Il réfléchit) Juste souhaite moi de bonnes choses. Je veux refaire la même chose que l’année dernière, mais dix fois plus fort. Il y a deux ans, on ne se voyait pas à ce niveau là alors qui sait où on sera dans deux ans ? J’espère dans un endroit extraordinaire. C’est le plan !


Dernièrement, nous partions à la rencontre de Buddy, le nouveau visage du rap californien et petit protégé de Pharrell Williams.

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