Veja, Le Pari De L'Eco-Cool

“Regarde, prends conscience des choses“, voilà ce que signifie Veja en portugais. 92% des produits fast-fashion aujourd’hui ne sont plus portés après 6 mois, la planète entière tire sur les ressources naturelles, les projets de développement durable de la plupart des entreprises cachent la triste et choquante réalité des conditions de travail très dures d’ouvriers exploités.

Un état des lieux peu glorieux qui a néanmoins donné à Sébastien Kopp et Ghislain Morillion l’envie et la force nécessaires pour se lancer dans un projet un peu fou, surtout très beau, qui repose, avant même de parler de mode ou d’esthétique, sur une idéologie durable en trois temps : écologie, développement social, justice économique.

UN PROJET ASSOCIATIF AVANT D’ÊTRE UNE MARQUE

LES PRÉMICES DE VEJA

Sébastien et Ghislain sortent respectivement de la fac et d’école de commerce, ont à peine 22 ans et présentent déjà des profils atypiques. Les grosses villes dans lesquelles ils vivent alors, Washington et New York, ne les séduisent plus, les domaines dans lesquels ils évoluent, internet et la finance, ne les convainquent plus. Nous sommes en 2001 lorsqu’ils créent un projet associatif sur le développement durable, et le proposent à diverses entreprises. “Le développement durable, c’était quelque chose d’assez nouveau à l’époque. Nous avions des profils économistes, on pensait déjà que le monde ne pourrait changer que par les entreprises, pas par les politiciens. On s’est vite mis en tête d’aller voir directement sur le terrain comment se passaient les choses.”

En 2003, ils voyagent à travers le monde pour explorer les projets d’entreprises comme Carrefour, EDF, IMERIS… liés au développement durable. Chine, Inde, Bolivie, Vietnam, Pérou, ils passent plusieurs semaines sur le terrain en vue d’analyser la relation entre population locale, entreprise et ONG, voir si les gens sont contents, si ces projets sont vertueux. “On disait aux entreprises ‘Vous ne nous payez pas, mais vous nous couvrez les frais de voyage. Les gens nous ont trouvé marrant, notre profil a plu. À ce moment-là, il y a très peu d’experts en matière de développement durable, les marques ont accepté”. D’un pays à l’autre, de nombreuses déceptions les attendent ; des discours d’entreprises rompus avec la réalité, des conditions de travail très dures pour les ouvriers, tous ces points négatifs leur apprennent énormément. Ils rentrent à Paris avec la conviction qu’un changement est possible.

RÉINVENTER LA SNEAKER

Sébastien et Ghislain décident de réinventer un produit concret, symbolique de leur génération : la basket. Sans étude de marché, ils suivent leur instinct. Nous sommes en 2004, à l’époque où la basket se démocratise ; elle arrive au bureau et en boîte de nuit. “On se laissait 6/8 mois pour essayer de faire quelque chose de cette idée, en ayant chacun environ 5000€ en poche. On n’y connaissait absolument rien en termes de baskets, de fabrication, de matières premières, mais on n’avait pas peur de voyager”. Direction le Brésil, leur coup de cœur. Non seulement s’y trouvent toutes les matières premières dont ils ont besoin (caoutchouc, coton bio), le pôle industriel du pays a survécu aux ravages de l’Asie, mais surtout, l’accueil brésilien est chaleureux.

DES FONDATEURS ENGAGÉS

La démarche primordiale et louable de Veja réside dans cette recherche constante du contact humain à travers des moyens justes, moraux. Sébastien et Ghislain partent en pleine forêt amazonienne rencontrer les coopératives de caoutchouc, et leur proposer de leur acheter à prix équitable, et agissent de la même manière pour le coton bio. De fil en aiguille, ils rencontrent de nombreux acteurs du marché et se créent leur propre réseau de personnes avec qui ils désirent travailler.

LE PARI DE L’ÉQUITABLE RELEVÉ

LA STRATÉGIE DU ZERO MARKETING

Produire au Brésil s’élève 5 à 7 fois plus cher que de produire en Asie. Sébastien et Ghislain ont fait le choix d’une qualité, du produit, mais aussi du rapport humain, face au marketing et à la communication. Effectivement, aucune stratégie de communication n’est mise en place par la marque. Publicité, placement de produit via la presse ou les influenceurs, la marque ne suit pas ces shémas.
Un budget qu’elle récupère donc au profit de ses engagements ; des employés bien payés, une collaboration sur le long terme avec des ONG et des associations de producteurs, une culture biologique sans produits chimiques, une justice économique à tous niveaux.

L’AGROÉCOLOGIE

L’agroécologie est une agriculture intelligente, qui vise à préserver les eaux, les sols, à favoriser des relations justes entre les différents acteurs de l’agriculture, plutôt que des relations capitalistes. Veja a relevé le pari de cette pratique en 2004, suite à sa rencontre avec Pedro, un brésilien rempli de sagesse et fort de 10 ans d’expérience en tant qu’ingénieur agronomique. Il s’occupe de la culture de coton bio équitable au sein de l’ONG Esplar, créée il y a 44 ans en pleine dictature, en mettant en place des solutions comme la création de réservoirs d’eau pour les agriculteurs.

Le projet de cette ONG va plus loin que toutes les autres, et c’est là que l’évidence d’une collaboration s’est présentée à Sébastien et Ghislain. En dehors de la pratique d’une justice économique, et du commerce équitable, le projet soutient également la lutte pour l’égalité homme/femme.

LA TRANSPARENCE

Veja n’a rien à cacher. Tant à travers ce voyage, à la découverte des racines de la marque et de ses enjeux, qu’à travers le site internet, on sent l’honnêteté et la passion des créateurs, désireux de faire évoluer la conscience morale, en partageant en toute transparence leurs combats, leurs difficultés, mais aussi leurs réussites. Le site internet, refait à neuf en mars dernier, se découpe ainsi en 13 chapitres, qui traitent des différents thèmes abordés par la marque, les matières, les sources.

Tout y est détaillé, expliqué, sans mensonges. Juste l’essentiel et l’essence de Veja.